S’ils sont ressentis comme des catastrophes inévitables, le changement climatique et le pic pétrolier peuvent apparaître suffisamment terrifiants pour que beaucoup d’entre nous évitent le sujet et ne rentrent donc pas en action. Pour favoriser les impulsions positives et les stratégies de changement désirables, l’Anglais Rob Hopkins propose de retourner la courbe de Hubbert. Ainsi, le pic devient une fosse... de laquelle nous allons sortir.
L’image du “pic” pétrolier qu’illustre la courbe de King Hubbert -symbolisant schématiquement une montagne- possède un effet potentiellement anxiogène évident: elle montre une progression vers un sommet, comme une progression constante, puis une descente, comme une dégringolade également continue. Beaucoup ont alors de bonnes chances d’imaginer avec angoisse que de l’autre côté du sommet, la situation sera de pire en pire.
Une vision qui permet de se propulser avec détermination vers l’air et la lumière du soleil au lieu de faire le trajet en résistant
Cette réalité peut même apparaître pour beaucoup suffisamment terrifiante pour paralyser toute action. Mais le pic pétrolier n’est pas la seule image que nous inflige l’or noir. Pour avoir une illustration “plus appropriée“ du pétrole (par exemple eu égard à la pertubation dangereuse du climat qu’il provoque), l’enseignant en permaculture et fondateur du mouvement Transition Rob Hopkins, propose d’inverser la courbe de Hubbert, de la regarder tête en bas, et de parler de “fosse pétrolière”. Cela ne change pas le problème mais lui offre une dynamique positive.
“Plutôt que l’escalade d’une montagne, nous pourrions voir l’ère des carburants fossiles comme une plongée dans un lagon fétide”, commente Rob Hopkins dans son Manuel de Transition (de la dépendance au pétrole à la résilience locale). Et ajoute: “On nous avait dit que d’immenses fortunes nous attendaient sous la vase du fond si seulement nous pouvions plonger assez profond pour les trouver. Au fil du temps, nous avons plongé de plus en plus profond, à la limite de notre endurance, entourés de révoltants sables bitumineux, ces raclures de baril de carburant fossile. Nous pouvons à peine discerner un éclat de soleil à travers le liquide au-dessus de nous, et notre besoin urgent d’inspirer nous propulse vers la surface en quête d’oxygène”. De la sorte, “au lieu de faire ce trajet en résistant, nous nous propulsons avec détermination vers l’air et la lumière du soleil, ” imagine-t-il.
Ruée viscérale vers la survie de masse
Pour lui, “si l’on regarde les choses ainsi, la course vers un monde libéré des carburants fossiles devient une ruée viscérale vers la survie de masse, un rejet collectif d’un mode de vie qui ne nous rend plus heureux, poussés par l’impérieux besoin de remplir nos poumons avec une chose encore imprécise bien que nous sachions instinctivement qu’elle nous rendra plus heureux que ce que nous avons. Peut-être l’arrivée dans un monde d’énergie réduite procurera-t-elle le même sentiment de satiété et de jubilation que l’arrivée à la surface, la bouffée d’air frais, l’émerveillement renouvelé pour la beauté du monde et la joie d’être en vie”.